Vous êtes ici

Un accompagnement pour toutes les exploitations de polyculture élevage

De g. à d. : Camille Ferry, conseillère stratégique à la Chambre d’agriculture de Haute-Marne, Alain Boulard, vice-président de la Chambre d’agriculture Grand Est, Béatrice Moreau, vice-présidente du Conseil régional, Véronique Laudinot, pilote régionale
De g. à d. : Camille Ferry, conseillère stratégique à la Chambre d’agriculture de Haute-Marne, Alain Boulard, vice-président de la Chambre d’agriculture Grand Est, Béatrice Moreau, vice-présidente du Conseil régional, Véronique Laudinot, pilote régionale

A l’occasion de son assemblée générale, le 15 mars à Chaumont, Haute-Marne Conseil Elevage a mis en avant le plan Oser polyculture élevage et le programme Ambition éleveurs.

Haute-Marne Conseil Elevage (HMCE) fait un constat alarmant : l’élevage décline fortement. Notre département a perdu 10 % de ses effectifs bovins depuis 2016. Avec moins de 400 fermes laitières (– 3 % en un an), la Haute-Marne a vu sa production de lait chuter de 10 % depuis 2010. L’enjeu est important car l’élevage représente 42 % de la valeur départementale de la production agricole, hors aides et services.

« Les éleveurs souffrent d’un manque de reconnaissance et souhaitent mieux vivre de leur métier » explique Olivier Perrin, président de HMCE, qui regrette la non application de la loi Egalim. « Une alimentation de qualité mérite un certain prix, sans cela l’élevage continuera d’être en difficulté ». Le vice-président de la Chambre d’agriculture de Haute-Marne estime que « le maintien de l’élevage passe aussi par une prise de conscience et un effort collectif ». C’est dans cet état d’esprit que les élus de la Chambre d’agriculture ont mis en place un comité d’élevage départemental, réunissant l’ensemble des OPA, qui souhaite améliorer l’image de l’élevage. « Notre première décision est de se regrouper pour communiquer sur l’ensemble des métiers autour de l’élevage. C’est nécessaire pour stopper cette dynamique négative, il nous faut un message positif à diffuser » souligne Olivier Perrin.

« Nous ne sommes pas résignés et on fera tout pour le maintien de l’élevage dans les meilleures conditions » tonne Olivier Perrin qui salue « la prise de conscience des élus à accompagner l’élevage dans cette période difficile ». L’éleveur fait allusion aux dispositifs Oser Polyculture Elevage, porté par les Chambres d’agriculture 10-52 et soutenu par la Région et le conseil départemental de la Haute-Marne, ainsi qu’Ambition Eleveurs, co-construit par le Conseil régional et la Chambre d’agriculture Grand Est.

Lien entre rentabilité et main d’oeuvre

Basé sur la même modèle que Oser en Barrois, Oser Polyculture Elevage a pour objectif d’« identifier les stratégies gagnantes dans les fermes les plus performantes, de sensibiliser et d’accompagner les exploitations » explique Jennifer Humbert, responsable de la filière élevage à la Chambre d’agriculture de Haute-Marne. Les premiers résultats de l’enquête réalisée sur 104 exploitations du département (essentiellement en bovins lait) révèlent que les exploitations avec la charge de travail la plus faible sont les plus à l’aise financièrement. Or, la moitié des exploitations n’a pas de salariés, les trois quarts utilisent de la main d’oeuvre bénévole.
« C’est une certaine faiblesse car que va-t-il se passer le jour où les membres de la famille ne peuvent plus venir travailler sur l’exploitation ? » note Louis Viry, conseiller à la Chambre d’agriculture de Haute-Marne. 56 % des exploitations estiment que la charge de travail est trop importante, 10 % se disent même débordés, mais les trois quarts des fermes qui cherchent des salariés n’en trouvent pas. La question de la main d’oeuvre est donc déterminante en polyculture élevage. Ces résultats vont encore s’affiner, d’ici la fin de l’année 400 exploitations de l’Aube et de Haute-Marne devraient être enquêtées.
Se pose aussi l’enjeu de la transmission, qui concerne plus de 50 % des fermes en polyculture élevage dans les 5 à 10 ans à venir. D’autant plus que le montant des capitaux d’une exploitation haut-marnaise est de 475 000 euros en moyenne. « Il faut être dans l’anticipation, cela permet de poser les enjeux et préparer l’exploitation à être transmise
» insiste Laurent Antoine, conseiller transmission à la Chambre d’agriculture.
Ce dernier a rencontré Estelle Foulon, qui élève une quarantaine de chèvres laitières à Riaucourt et qui se pose déjà des questions : « Est-ce que ma structure aujourd’hui est transmissible ? Ai-je des démarches à faire ? Que dois-mettre en place ? On n’est jamais trop jeune pour parler de la transmission ».

Une vision à long terme

Hors viticulture, la moitié des fermes de la région sont en polyculture élevage. Le programme Ambition Eleveurs vise l’accompagnement de 2000 fermes du Grand Est sur 5 ans. « Cela démarre par un diagnostic, puis une approche globale et systémique » explique Jennifer Humbert. Rappelant la nécessité de « protéger ce modèle spécifique du Grand Est » afin de « garder cette valeur économique du territoire », Béatrice Moreau, vice-présidente du Conseil Régional, fait remarquer que « faire le point sur son exploitation et son fonctionnement donne un nouveau souffle pour se projeter ». Alain Boulard, vice-président de la commission élevage à la Chambre régionale d’agriculture, précise qu’il s’agit de « faire un tour à 360 degrés de l’exploitation, mais aussi de prendre en compte toutes les attentes sociétales, sans lesquelles on ne pourra pas exister demain », en citant les enjeux thématiques du plan Ambition éleveurs : l’autonomie fourragère et protéique, l’accompagnement du numérique, ainsi que la maitrise de l’énergie, des intrants et de la ressource en eau.

Camille Ferry, conseillère stratégique à la Chambre d’agriculture de Haute-Marne, met en avant « une vision à plus long terme des exploitations » tout en travaillant sur « la résilience des systèmes ». Un conseiller orientera l’éleveur vers le parcours et les expertises adaptés à son projet ou simplement à ses objectifs (lire également en page 07). « Plusieurs types de parcours sont possibles et l’éleveur choisira l’organisme qui l’accompagnera » indique Véronique Laudinot, pilote régionale du plan Ambition Eleveurs à la Chambre d’agriculture du Grand Est.

60 fermes de démonstrations réparties sur l’ensemble de la région (6 par département) seront les vitrines du dispositif « Ces exploitations permettront de montrer l’expertise du monde agricole, ce qui se fait sur les territoires. Les agriculteurs vont tester des choses pour voir ce qui marche ou pas » explique Béatrice Moreau. L’EARL Delaloy-Husson à Ambonville, fait partie de ces fermes de démonstrations. Didier Busson y exploite 175 ha et 65 vaches laitières. Il a de nombreux projets comme construire une retenue d’eau pour irriguer ses cultures fourragères ou encore mettre en place de l’agroforesterie. « Je souhaite aussi faire de nouveaux bâtiments pour améliorer nos conditions de travail. Les actuels datent des années 70, ils ne sont plus adaptés aux animaux » explique l’éleveur qui installera des panneaux photovoltaïques sur toiture.

Afin d’installer son fils sur la ferme, il envisage d’agrandir son troupeau et d’investir dans un second robot de traite. Pour lui le programme Ambition Eleveurs est une opportunité, car « vu les investissements, sans subventions on ne fait rien ». De plus il apprécie cette approche qui permet de « remettre à plat tout le système, car on ne prend jamais vraiment le temps faire un bilan ». Enfin, Didier Husson ajoute qu’une ferme de démonstration est l’occasion pour lui « de voir des gens qui viennent de l’extérieur, cela nous amène de nouvelles idées ».