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Un manque de notoriété

« La connaissance du produit passe par une communication auprès du grand public » ont insisté Sylvain Boby et Olivier Vallat, respectivement président et animateur du Sfaet.
« La connaissance du produit passe par une communication auprès du grand public » ont insisté Sylvain Boby et Olivier Vallat, respectivement président et animateur du Sfaet.

Une vingtaine d’acteurs de la filière Emmental français Est-Central, grand cru label rouge, étaient réunis au musée de l’horlogerie à Morteau le 1er juin. Entre inflation et manque de reconnaissance du produit, pas toujours évident de tirer son épingle du jeu.

L’Emmental grand cru label rouge a atteint un volume de production de 3 694 tonnes en 2022. Petit Poucet des fromages à pâtes pressées cuites, il représente 1,5 % de la totalité des Emmental vendus en France. Même avec l’aide de son voisin Emmental de Savoie (sous IGP mais non détenteur du label rouge), le tonnage plafonne à 3 %. Se démarquer est bien tout l’enjeu de ce fromage qui pâtit d’un nom sans doute trop générique.

En France, 250 000 tonnes d’Emmental sont produites chaque année. D’abord consommé comme fromage d’accompagnement sur des pâtes, des pommes de terres, l’emmental industriel est un passe-partout. Le cahier des charges des emmentals labels rouges est quant à lui qualitatif. Durée de pâturage de minimum six mois, interdiction d’utiliser du fourrage fermenté, ce fromage au lait cru affirme un goût et une texture qui n’ont rien à voir avec son cousin breton.

Eclipse du label au moment de l’achat

« Le label rouge est connu de la population. Il est même le premier signe officiel de qualité cité par les consommateurs avant le bio » explique Olivier Vallat, relayant à l’assistance une enquête menée par Fedelis (Fédération regroupant les labels rouges, les indications géographiques et les spécialités traditionnelles garanties). « Pour autant, le consommateur, impacté par l’inflation, porte son choix, au moment de l’achat, sur l’emmental non labellisé. C’est une question de prix à n’en pas douter. Et parfois aussi une question d’étiquetage. J’ai vu dans une GMS un emmental de Savoie étiqueté par le magasin « Emmental Grand cru Label rouge » vendu avec un couteau aux couleurs et à l’estampille de l’emmental suisse. (L’emmental de Savoie ne possède pas le label rouge) « le summum de la confusion » poursuit l’animateur du Sfaet (syndicat des fabricants et affineurs d’emmental traditionnel).
Un choix du consommateur qui se porte sur le prix au détriment des qualités organoleptiques et culinaires que propose l’emmental grand cru. Dans son rapport moral, le président de l’Emmental français Est-Central, grand cru label rouge a d’ailleurs rappelé le bilan de l’évaluation de la qualité des fromages. « 4 niveaux d’évaluation des fromages existent. En cave d’affinage, deux fois. D’abord pour vérifier l’évolution des meules par l’opérateur en charge de la cave puis lors d’un super-contrôle sur chaque lot mis en marché par un agent formé et habilité par l’ODG. A ce moment de l’évaluation, on vérifie selon une grille de référence que les meules sont conformes aux exigences du cahier des charges label rouge. Un troisième niveau d’évaluation a lieu lors d’une commission d’examen organoleptique supervisée par l’organisme de gestion (le Sfaet) qui  compare des fromages label rouge à un emmental courant. Enfin lors d’un test hédonique auprès d’une soixantaine de dégustateurs » explique Sylvain Boby. Un cahier des charges strict, un suivi rigoureux qui ne sont pas suffisamment lisibles selon le président. « Nous devons encore plus communiquer pour être mieux connus et reconnus des consommateurs » insiste le producteur de Bournois.

Entrer dans le plateau régional

Faire partie de l’offre régionale des produits fromagers sous signes officiels de qualité pourrait être une option gagnante pour le fromage à larges ouvertures. A la condition d’être présent dans les zones d’approvisionnement. « Les choix politiques favorisant le circuit-court notamment dans les cantines scolaires ont malheureusement peu d’impact pour nous. Nos entreprises ne sont pas équipées pour assurer cette logistique. Il est impératif que les grossistes soient pris en compte pour rendre disponible l’emmental grand cru en restauration collective. Idem pour les magasins de proximité et la restauration collective pour escompter approvisionner ces marchés » argumente le président. Le syndicat affirme sa volonté de faire découvrir ce produit local de qualité au plus jeune public, le fidéliser à la consommation de ce fromage au goût fruité assurerait aussi sa pérennité. Sur le créneau de l’emmental grand cru en ingrédient cuisine, le produit a aussi des différences à faire-valoir. « L’emmental grand cru label rouge fond plus facilement qu’un emmental courant. C’est reconnu grâce à des tests de comparaison les plus sérieux qu’ils soient, effectués autour de la capacité à filer des différents emmental » annonce l’animateur du Sfaet.
Un produit facile à travailler en restauration, gouteux, fruité avec une texture souple et légèrement fondante, qui plait. Un cahier des charges renforcé et validé par l’Inao. Il revient maintenant aux producteurs, aux côtés des transformateurs, de s’investir un peu plus encore dans une communication du produit et un coup de pouce des magasins où l’on retrouve les autres fromages sous signes officiels de qualité du massif jurassien pour déployer une consommation à la hauteur des attentes de la filière.