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Une adaptation au changement climatique nécessaire

Julien Fiqueron, ingénieur forêt et eau au CNPF, a mis en avant les avantages de la forêt sur la qualité de l’eau.
Julien Fiqueron, ingénieur forêt et eau au CNPF, a mis en avant les avantages de la forêt sur la qualité de l’eau.

L’assemblée générale des communes forestières de Haute-Marne (COFOR 52) s’est tenue le 2 juin au Conseil départemental. La relation entre l’eau et la forêt ainsi que le réchauffement climatique ont été les thèmes abordés.

« La forêt est un enjeu économique important en Haute-Marne (40 % du territoire est boisé), mais aussi pour la politique d’attractivité touristique et résidentielle du Département » a rappelé Anne-Marie Nedelec, vice-présidente du Conseil départemental, en introduction de l’assemblée générale du COFOR 52, association qui regroupe 230 adhérents.

Le président du COFOR, Jean-Pierre Michel, a rappelé les enjeux des communes forestières : « aider la foret à relever le défi du changement climatique, garder la valeur ajoutée du bois sur le territoire et un partage de la forêt avec intelligence. L’économie et l’écologie oui, mais sans idéologie ».

L’élu estime que la forêt n’est pas prise en considération et souhaite « la création d’un Secrétariat d’État de la forêt, pour n’avoir qu’un seul interlocuteur ».

Travaux forestiers menacés

292 000 m³ de bois de forêts communales ont été vendus en 2022 (-34 %) pour un total de 12 M€ (+8%). Jean-François Thivillier, directeur de l’agence ONF de Haute-Marne, explique cette hausse des recettes par l’augmentation des prix unitaires, en particulier le chêne « dont les cours ont explosé l’année dernière, mais qui stagnent en 2023 ».

Alors que 80 % des exploitations forestières sont réalisées par les entreprises de travaux forestiers (ETF), Frédéric Mutz, représentant régional des ETF, demande un éclaircissement d’une directive européenne, et en particulier de l’article L411-01 du code l’environnement, relatif à la protection des espèces protégées et des habitats d’espèces.

Car l’Office français de la Biodiversité (OFB), après avoir gagné son procès contre la société forestière de la Caisse des dépôts, a demandé de suspendre tous les travaux à partir du 1er avril. « Selon l’interprétation de l’OFB, tous travaux forestier, de sylviculture, d’exploitation et de débardage seraient interdits du 1er avril au 1er septembre, ce qui représente cinq mois de travail en moins pour les entreprises » explique Frédéric Mutz qui rappelle qu’il faut encore ajouter les mois où la forêt est inaccessible (intempéries, battues de sangliers…).

« Au niveau national plusieurs organisations ont alerté sur les conséquences de cette interprétation de la loi par l’OFB. Si les travaux forestiers subissent cette interdiction d’intervention, les ETF ne seront plus rentables et toute la filière sera pénalisée » alerte le maire d’Euffigneix.

Ainsi, les chantiers ont été arrêtés depuis le 30 mars, sauf ceux concernant les reboisements. « Si demain il n’y a plus d’entreprises de travaux forestiers, que vont devenir nos emplois, nos scieries et nos forêts ? » s’insurge Jean-Pierre Michel.

Préserver la qualité de l’eau

Les services rendus par les forêts sont nombreux, notamment en matière d’eau. C’est ce qu’a démontré Julien Fiqueron, ingénieur forêt et eau au CNPF (centre national de la propriété forestière). « La forêt favorise le drainage vers le sous-sol, ce qui est favorable à l’alimentation des nappes. De plus, les arbres limitent le ruissellement et l’érosion des sols par l’interception d’une partie des précipitations par les branches ».

La forêt a l’avantage de préserver la qualité de l’eau, c’est en effet le meilleur couvert végétal pour obtenir de faibles teneurs en nitrates. Ainsi, elle permet de faire des économies de traitement d’eau.
Si l’environnement forestier est recherché pour protéger l’eau, il reste un espace semi-naturel, car il faut en assurer la gestion. « Certains voient toute action en forêt comme une menace pour la qualité de l’eau, mais les forestiers savent associer sylviculture et protection de l’eau, il ne faut pas opposer ces deux aspects » souligne Julien Fiqueron qui précise que l’aggravation du changement climatique menace les services de protection de l’eau en forêt.

Adapter les forêts

« Aujourd’hui, même dans le Grand Est, on voit concrètement les menaces et les conséquences terribles du changement climatique sur nos forêts. Nous avons des défis devant nous » indique la conseillère régionale Sophie Delong, faisant allusion aux incendies de forêts de l’année dernière dans les Vosges, les Ardennes et la Haute-Marne.
Ainsi l’ONF déploie de nouvelles mesures de prévention des incendies en missionnant 20 agents pour surveiller les massifs forestiers cet été. « Le gros enjeu de l’ONF est d’adapter les forêts au changement climatique » déclare Olivier Rousset, directeur général adjoint de l’ONF, qui table sur un réchauffement de +4 °C par rapport à l’ère pré-industrielle.